Est-ce que demain finira bien ? (2)
Ça s’entredéchire, ça complote, ça trahit, ça s’emparouille, ça s’endosque. Au milieu de la tempête, quelques-uns tentent de s’associer au-delà de leurs certitudes pour que les deux dimanches à venir ne soient pas cette grande peur brune annoncée. Pour retrouver nos esprits et redresser la tête des ombellifères, un peu, voici un extrait de Depuis toujours nous aimons les dimanches de Lydie Salvayre…
« Vous nous vendez sans cesse le bonheur d’exister en consommant et consommant et consommant à perte de vie. Mais comment, Messieurs, concevez-vous le bonheur ? Comment ? Vous êtes-vous demandé un seul jour : que fous-je de ma vie ?
Qui ai-je vraiment aimé ? Par quoi fus-je comblé ? Qu’ai-je trouvé de beau et d’admirable dans ce cirque sauvage qu’est devenu le monde et qui me permette de l’endurer ? La mer ? L’enfance ? Cette étrangère à tout calcul qui s’appelle l’amitié ? L’imprudence insouciante ? Le pouvoir de dire non aux idées préconçues comme aux agenouillements ? Que signifie pour vous les mots liberté, solidarité, partage et quelques autres de ce gabarit dont vous avez la bouche pleine, si vous ne pouvez entendre que la plupart d’entre nous ont perdu, à force que vous leur mentiez, toute confiance en eux ?
Faites-nous cet honneur, Messieurs, de nous qualifier d’utopistes. C’est la raillerie coutumière jetée par les esprits étroits qu’une vétille effare aux rares audacieux qui se risque à cracher dans la soupe. Nous avons le souvenir de quelques crachats sublimes, et serions, pour tout dire, extrêmement flattés d’être accusés d’une telle insolence. »