Plus tard…

Depuis deux jours, à ton réveil, les nausées sont là
tu n’as pas envie de descendre te faire couler un café et te griller une tartine
tu restes allongée
attendant qu’elles partent par le velux ouvert sur le jour qui se lève
pour mieux les ignorer tu lis
Brouillard mais ça se dissipera d’Albane Gellé
« pendant que des amis / viennent / et nous aiment / et nous accrochent / des parachutes sur le dos
on ne veut rien / entendre / mais ils insistent / la vie insiste »
Plus loin qu’ailleurs de Chabouté
il te ressemble ce gardien de nuit : il voulait la grande aventure en Alaska mais sa jambe dans le plâtre l’invite à s’asseoir sur un banc au milieu de la place devant chez lui pour contempler des petits riens
toi tu as renoncé aux grandes randonnées sur les GR de montagnes, à la Drôme, à la Crète
ton banc est au bout du chemin en bois des Pâtures
c’est un espace préservé qui pépie de toutes parts
tu ouvres Merlin Bird sur ton portable
tu fermes les yeux et écoutes attentivement
n’existe-t-il pas un verbe pour dire cela
quand tu les ouvres à nouveau monte en toi cette joie de gamine qui partait à la chasse aux papillons avec son filet
Merlin Bird a identifié : troglodyte mignon, gobemouche gris, pouillot véloce, mésange charbonnière et bleue, fauvette à tête noire, accenteur mouchet, grive musicienne, linote mélodieuse, orite à longue queue, buse variable et héron cendré

Quand tu seras remise des nausées, des chimios, des opérations, des rayons et de tout ce que tu ne sais pas encore, tu inviteras toutes celles et ceux qui sont venu.e.s t’accrocher des parachutes dans le dos à monter dans une montgolfière (faudra qu’elle soit très grande) et vous vous élèverez au-dessus de cet espace qui est le tien et qui te soutient.