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ad ultimam
Ce lundi, la canicule (du lat. canicula, « petite chienne ») a enfin lâché prise. Les Bretons et P. ont lancé une opération nettoyage du jardin de ta biquetterie. Le midi, vous vous retrouvez autour de la table. Vous parlez d’hier, de la randonnée à Lyons-la-Forêt. Il faisait tellement chaud qu’à tour de rôle ils avaient maintenu un parapluie ouvert au-dessus de ta tête. Les passants te regardaient, espérant croiser quelque célébrité. Vous aviez ri comme des gamins. Tu ne sais plus pourquoi mais autour de la table, P. et toi avez dévié vers des énigmes étymologiques. Il te demande si tu connais l’origine du mot adulte. Avec une fausse modestie, tu…
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Ombres
Tu te demandes :si l’ombre d’un homme peut être le rêve d’un arbrel’ombre de l’arbre planté là haut sur les cendres de ta disparuepeut-elle être le songe d’une femme ? photo : Ce que je sais de mon ombre, Fabien Mérelle, exposition « Ligne de vie » à la Matmut, St Pierre de Varengeville.
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Métaphore
elles avancent inlassablementaller et retourles fourmis sur le tuyau d’arrosageest-ce un raccourci pour ellesplutôt que le passage par l’herbe sèchetantôt à droite tantôt à gaucheil n’y a pas de règle de circulationquand elles se rencontrentelles donnent elles prennent rapidementdes nouvelles du bout de leurs antennes et repartent déterminées
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« Moi par dessus tout, c’est la gaieté qui m’en impose. »Nicolas Bouvier, L’usage du monde Et c’est François Morel dans sa chronique qui en parle si bien…
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(dé)gonflée
J’ai lu quelque part que la nacelle de la montgolfière est appelée une gondole. La chimio de la semaine dernière m’a méchamment gondolée. Alors que j’avais traversé les six précédentes avec impertinence, en mode la bacchante battante d’une énergie époustouflante qui continue de marcher, courir et faire du vélo entre deux, la 7ème m’a prise par surprise. Choc anaphylactique. Une enveloppe sans le souffle qu’il a fallu garder en observation. J’ai bien cru que je n’y arriverais plus, à marcher, à courir, à monter sur un vélo et à retourner en chimio. Me voici à nouveau gonflée, mon corps ne manque plus d’air et demain j’irai humblement pointer pour la…
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Drone / ronde
Ce matin, tu es déjà branchée à la première poche de chimio, celle qui va te faire somnoler et te coller les neurones entre eux. Tu ouvres ton calepin et notes quelques idées en attendant de pouvoir aller sur tes îles indigo. C’est le mot drone (est-ce parce qu’il rime avec neurone ?) qui apparaît. Il te faudra trouver les mots justes pour parler de ceux qui envahissent le ciel de Gaza, du massacre sans fin en dessous, du voilier Madleen (prénom qui vient de l’hébreu Magdala « celle qui évoque un souvenir ») arraisonné par Israël. Oui, il faudra. Il faudra aussi parler du ballet de drones qui a noirci le…
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Tu refermes chaque journée tôt inutile d’aller quémander un rab d’énergie quand les batteries sont à platen échange tu ouvres la suivante au moment même où un premier oiseau est-ce le même chaque matindonne le la à tous les autressoudain c’est concert dans l’airpour appeler le soleil qui se fait beauun nuage s’est installé sur le fil électriqueaux premières logestoi tête et pieds nus dans ta ruetu laisses cet instant te vivifier
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Cheveux au vent
Petite poucette dans tes jardinstu te suis à la tracecheveu après cheveuque les mésanges ou les oies sauvagesqui seraient en train de finaliser leur niden profitentP. ton coiffeur persovient raser ton crâne gratis cet après-midi
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(im)mobilité
Tu as mis en place un rituel qui te plaît : tu as posé un transat sur l’allée du potager qui mène au cabanon des semis. Là, chaque matin, au milieu de la végétation, tu t’assieds avec ton 2ème café, tu regardes monter la nouvelle journée. Tu ne sais pas ce qu’elle va te proposer, une longue randonnée comme mardi soir au retour de ta 3ème chimio, une balade vélo comme hier matin ou une irrésistible et longue sieste bercée par la pluie sur le velux comme hier après-midi. Tu écoutes ces rythmes nouveaux, tu aimerais y lire une certaine régularité. Tout se rejoue chaque jour. L’accepter avec l’élégance de…
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Et de deux !
Taxi-wonder-woman vient de te déposer chez toi. Après toutes ces heures passées dans un fauteuil médical à attendre que les poches du nectar, une à une, s’écoulent en toi, tu as besoin de rééquilibrer la journée. Tu enfiles tes pompes de rondo et pars. Le tonnerre gronde au loin. Tu as toujours aimé marcher au bord d’un orage. Alors que tout semble à l’arrêt dans l’attente de la pluie, toi tu avances d’un bon pas. Tu grimpes sur les coteaux de Seine et laisse cette deuxième journée de chimio (plus que dix) remonter. Elle t’a offert tant de douceurs :Le rendez-vous avec l’esthéticienne qui dédramatise tout ce que tu dois…