• Biffures,  Instants

    « En français, ils ne tiennent qu’à un fil. En néerlandais, ils appartiennent au jour. »Il a fallu que je lise cette phrase-chapitre pour réussir à retenir le titre du premier roman d’Emma Doude Van Troostwijk, Ceux qui appartiennent au jour. Peut-être parce que ses personnages sont plongés dans une nuit – Alzheimer, burn-out ou questionnement sans réponse- et que je ne réussissais pas à mettre du lien.« En français, ils ne tiennent qu’à un fil. En néerlandais, ils appartiennent au jour. »Le grand écart entre deux langues. Ici, le danger, là l’impression d’être à la juste place. La narratrice s’approche de ses hommes cabossés avec une telle tendresse qu’elle en éclaire leur nuit.…

  • Instants,  La classe !

    Pierres d’achoppement

    La semaine dernière, j’ai suivi, chaque jour, le même itinéraire, de la rue Louis Blanc à l’avenue Grammont, en passant par la place Voltaire et la rue du Cours. L’espace de vingt minutes d’un pas rapide, en mode automatique, je me perdais dans mes pensées. Un matin, après une nuit pluvieuse, elles faisaient tellement bloc sur le bitume de la rue du Cours que je n’ai pas pu les éviter : huit pierres d’achoppement, toute une famille arrêtée là, au numéro 48 puis déportée et assassinée à Auschwitz.L’après midi, j’ai traversé la Seine pour aller voir Zone d’intérêt de Jonathan Glazer. Je garde en tête le bourdonnement incessant de la…

  • Instants,  La classe !

    Temps de falaise

    Il fait un temps de falaiseun temps de dessous de falaisela pluie le froid des rocs cèdentje les évite tant mal que malje voudrais m’asseoirretrouver mon souffle mon quotidiensemaine éreintante et dépôt de plaintecontre une contre un contre Xqui sur Tiktok -tic-tac compte à rebours lancé-menace de me coincer dans une ruelle sombreaprès le brevet blancil fait un temps de dessous de falaiselignes noires dans la rochemais moi je voudrais à nouveaume tenir là-hautdéfier le vide et la fragilité du sol sous mes piedsmême pas peur regard en équilibresur l’horizon la houle et les vents

  • Instants

    Sur le fil

    Assise au coin du feu, l’espace d’une cigarette, je laisse mon regard monter jusqu’à la fenêtre. De l’autre côté se tient la dépendance. Rien ne semble bouger : les tuiles sur le toit, le gris du ciel, la goutte de la pluie d’hier suspendue à la fuite de la gouttière. Tout est immobile. Aucun passage d’oiseau pour tracer une diagonale dans ce cadre. Pourtant le regard devient peu à peu plus habile comme lorsqu’il est plongé dans le noir et qu’il s’étonne de distinguer enfin des volumes. C’est imperceptible mais les deux épingles à linge oubliées sur le fil depuis cet été oscillent légèrement. Elles attendent les draps qui battront…

  • Instants

    Avis (2)

    Avant c’était l’ANPE. À Ne Plus Employer. Après est venu le tour de Pôle Emploi. Lui aussi vous pouvez l’oublier. Alors vous vous demandez avec un intérêt non dissimulé : quelle nouvelle pancarte les technocrates ont inventée pour faire croire à un changement ? Cette fois-ci, il a suffi de descendre dans les caves de l’État, d’en choisir une qu’ils se sont empressés de dépoussiérer. Ils ont aussi rayé deux mots d’un feutre délébile -bientôt ils passeront un coup d’éponge- et le tour était joué : France Famille Patrie Travail.

  • Instants

    Je me souhaite de chérir sans chercher à le rectifierce qui en toi par les vents violents lancés comme on lance des désa été distorduà en avoir le souffle coupéune dernière foislà est l’espace de notre luttelà est l’espace de notre beauté photo : arbres tempétueux, Varangeville